L’album Blue Valentine s’ouvre avec une interprétation de « Somewhere », une chanson écrite par Bernstein et issue de la comédie musicale West Side Story. Son instrumentation est constituée d’un grand ensemble de cordes et d’une seule trompette. Waits, avec l’émotion ténébreuse si caractéristique de sa voix rauque, chante ce texte empreint d’un profond et douloureux espoir amoureux. Cette pièce ne donne toutefois pas le ton à l’album, car le reste nous entraîne surtout dans le sentier d’un Modern jazz bluesy beatnik.

C’est à San Francisco, en 1978, que les sessions d’enregistrement de cet album ont lieu. À mi-chemin du processus, Waits décide de destituer ses musiciens. Les nouveaux instrumentistes engagés déclenchent un point de transition sonore chez l’artiste : les quatre albums précédant Blue Valentine proposent surtout des chansons au piano accompagnées d’un ensemble façon jazz de cabaret enfumé. Ici, la guitare électrique devient plutôt l’instrument principal, reléguant le piano acoustique au deuxième rang ; même que le Yamaha Electric Grand Piano de la série CP lui succède régulièrement. D’autres instruments s’amalgament aléatoirement sur l’album : basse électrique, sax ténor, orgue, batterie et conga. Le moment fort du disque est sans contredit la chanson « Christmas Card from a Hooker in Minneapolis », jouée sur deux pianos (acoustique et électrique) – une des plus célèbres de toute la carrière de l’artiste. L’opus se referme avec « Blue Valentines », une superbe chanson mélancolique, intensément chantée sur une magnifique musique composée d’une suite d’accords de standard jazz, exécutée à la guitare électrique.

En rétrospective, après plus de quarante-cinq ans de carrière, la discographie de Tom Waits est très imposante. L’album Blue Valentine se retrouve sans équivoque au sein de la grande liste d’albums chérie par les admirateurs de Tom Waits, cet artiste à la signature profondément marquée et au parcours totalement singulier – à qui on voue littéralement un culte…

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